-
Parutions/Recensions*16
16
Dernières parutions de nos membres parmi de très nombreuses parutions à nos Éditions
(recueils avec recensions*16)
*
Vous trouverez un bulletin de commande sur notre site
Pour commander un recueil, se renseigner au siège,
on ne peut indiquer le tarif du recueil choisi
nous ne sommes pas une entreprise commerciale
*
par MICHEL BENARD
Lauréat de l’Académie française.
Chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres.
Poeta honoris causa.Annick Gautheron – Le souffle de Calliope – Editions Copymédia – Format 15x21 – Nombre de pages 107 – illustrations de l’auteure - 2 -ème trimestre 2023 -
Ce recueil se présente sous la forme d’une sorte de compilation anthologique personnelle où les textes ont été choisis selon des critères de distinctions reçues au fil de diverses joutes poétiques. Nous voici ici emportés dans une turbulence mythologique. Notre poétesse Annick Gautheron déploie son étendard aux armes de la poésie sous « Le souffle de Calliope » muse de la poésie lyrique, libre, insoumise, c’est un signe annonciateur, car c’est bien dans cette perspective que se présente et qu’il faut percevoir l’acte poétique de notre amie. Dans le souffle de la liberté et le droit de rêver.
Notons qu’Annick Gautheron, commence par son inspiration de prédilection l’enfance, les enfants, la famille, ce « Cadeau du ciel » puis évoque les présences mystiques dans les monuments d’antan comme dans l’Abbaye de Cluny, auquel je ne crois pas, je suis justement en train d’écouter au seuil de cette préface : « Les chants du XII -ème siècle de l’Abbaye de Cluny » composés par Pierre le Vénérable abbé de Cluny.
La plume de notre poétesse nous situe d’amblée au cœur de son jardin d’enfance, là où sans doute elle se ressource pour retrouver la beauté d’une certaine vérité au cœur de l’innocence. C’est ici qu’elle cultive l’espérance, qu’elle ébauche les portraits de l’amour, qu’elle tresse des cœurs dans le ciel.
Inévitablement l’enfance nous conduit, nous projette vers le futur, alors que le nôtre est bien compromis face à cette équation de l’absurde, même le vieux sage ne sait que répondre à l’enfant qui le questionne, sinon que ce monde altéré, violé, exsangue, est le résultat de la cupidité, de l’ignorance et de l’inconscience des hommes : « Dis, Monsieur Rabhi, pourquoi le bleu de ta planète disparait ? » force est de constater : « Mon cher Petit Prince...c’est seulement... la folie des hommes... »
Notre poétesse se surprend à parler aux pierres, aux arbres, aux oiseaux, ce qui nous révèle un petit côté Saint François d’Assise. Cette poésie englobe les présences énigmatiques ressenties dans les vieilles pierres, auxquelles elle donne la parole « Et le temps m’emportera » pour la maison en ruine, le « Manoir infâme » ou « Le moulin du poète », l’Abbaye de Cluny dont l’ombre étend son recueillement sur la poésie d’Annick Gautheron dans les murmures inspirateurs des chants grégoriens. Il n’est pas rare de voir sa poésie passer de l’image afin de se conjuguer avec le verbe. Dans chacun de ses poèmes, il y a une notion de voyage, de découverte de l’inconnu.
La poésie est une surprise qui s’entretient, qui contient toujours un parfum d’innocence, d’étonnement, qui se construit de façon informelle aux sources de l’éphémère, où se compose un nuancier aux couleurs de la mer, du soleil et du ciel, telle est sa conception et composition en forme de liberté : « Relis mon petit poème de liberté, envole-toi pour un voyage rêvé. »
Prose et poésie se mêlent effrontément, mais se complètent judicieusement. Lorsque la poésie se veut musicale, la prose se fait princière, elle est un refuge qui sécurise, mais également une pérégrination vers l’inconnu. Un vent marin souffle parfois sur les voyelles de la poésie en lui insufflant l’image du voyage.
A la poésie nous pourrions associer l’illustration. Toutefois Annick Gautheron demeure assez discrète sur le fait, elle ne veut rien nous démontrer sur cet aspect graphique, ce n’est qu’un petit supplément à son arc loin d’être négligeable, car par ses compositions en technique mixte, collages, assemblages, photos, pigments divers, notre amie offre une petite touche originale à ses poèmes, c’est une note de fraicheur réhaussant l’esprit.
Annick Gautheron est une perfectionniste, souvent habitée par le doute, l’incertitude, mais toujours en quête d’absolu. C’est une voyageuse qui ferme les yeux et se laisse bercer par ses rêves. Peut-être est-ce une manière de suspendre un peu le temps.
Tout rêveur qu’il soit, le poète n’échappe pas aux coups de boutoirs du cycle de la vie, alors naissent sous sa plume des fragments d’existences, des drames, des joies, des promesses, des détresses, des trahisons, des amours incertaines marquées des stigmates incontrôlés.
L’Amour clé de voûte de l’humaine condition ! L’Amour et la Liberté, thèmes dominants du jardin intime de notre amie. Néanmoins et afin d’entretenir le foyer du désir, je ne vous révélerai rien de plus sur : « Le souffle de Calliope » et j’en resterai à ce texte « Je suis un Poème LIBRE » qui me sensibilise beaucoup, parce qu’il se présente à contre-règles, justement au nom de la Liberté.
Conclusion je n’ai aucun doute sur le fait qu’Annick Gautheron adhère à cette vision, que le poète, comme le peintre, doivent faire en sorte que la beauté devienne visible.
Michel Bénard.
Christophe Lombardi – Les saisons- Editions les poètes français- Illustration photographie de l’auteur- Format 15x21 – nombre de pages 59- 4 -ème trimestre 2022-
Le thème « Les saisons » est un sujet éternel et se renouvelle indéfiniment sous la plume des poètes, sous le pinceau des peintres et la partition des compositeurs : « Et va mélodieux, tel le chant d’une harpe. » C’est sur ce terrain changeant et mouvant, sous les jeux des métamorphoses que nous conduit Christophe Lombardi. Spectacle chancelant, un chant continu. Le poète dialogue en silence avec les éléments, avec l’éclat de diamant des eaux limpides que le soleil saupoudre de lumière. Pareille à la nature, l’écriture contient ses secrets et le poète, dans l’utopie de son rêve flamboyant, tente de les décrypter. L’écriture ici se fait porteuse d’une certaine liberté et pourtant elle retient en elle une sagesse classique, fruit d’un labeur opiniâtre et fragile. Comme les giboulées le verbe est parfois surprenant, déstructuré, il rit sous la lumière, se ploie sous le vent et jaunit sous un soleil carminé. L’homme du haut de sa superbe est bien insignifiant face au rythme de la nature qui finit toujours par reprendre ses droits. C’est une poésie bousculée qui s’offre à nous, non pas dans sa nudité, son dépouillement, mais enveloppée d’un voile suggérant un certain hermétisme. Alexandrins, quatrains, sonnets etc, nous entraînent sur les chemins perdus des neiges étoilées, de sublimes silences, d’instants de violence ponctués de trappes traîtresses. L’auteur laisse volontairement planer sur ses vers, une sorte de mystère fruit d’une expression codée et fragmentée : « Qu’on dévoile parfois aux clartés de l’ivresse. » C’est une porte ouverte nous permettant d’aller voir l’envers du miroir. Mirage ou réalité ? « Et mon rêve envolé laisse l’espace vide. » Un déferlement d’images s’entremêle, délivrant un flot d’interrogations : « Souvenir, souvenir, que me veux-tu ? » Dans les frissons du violon, l’hiver passe dans l’attente de la renaissance du printemps. En refermant ce recueil, je pense avoir emprunté le chemin d’un verbe fécond, qui parfois nous déroute, mais où il suffit de lire les idéogrammes du message.
Michel Bénard.
Recension : Isabelle Gayet – Joëlle Vincent – Noël Metallier - Terza Rima – Préface Christian Malaplate – 4 -ème de couverture Jean-Pierre Paulhac - Illustration de la couverture TRILOGIE de Noël Métallier - Editions les Poètes français – 2 -ème trimestre 2022 – format 15x21 – nombre de pages 116 –
Terza Rima est un recueil à six mains, trois cœurs où chacun brode sa partition jusqu’à se retrouver dans une harmonieuse composition. Ce triptyque poétique se rapproche de la forme du – cadavre exquis - où les poèmes d’ Isabelle Gayet, Joëlle Vincent et Noël Métallier s’enchainent et alternent dans la révélation d’un langage commun. Belle démonstration de poésie conjuguée, mais aussi et surtout un bel exemple d’amitié, c’est une noble forme de liberté où comme le souligne d’une manière autorisée Christian Malaplate dans sa préface : - Il y a des mots qui brûlent pour faire apparaître l’éclosion lente et suprême des chemins de la liberté. –
En introduction Isabelle Gayet pleure la mort d’un arbre vaincu dans un combat irrégulier. Elle nous offre une poésie qui s’échappe en volutes légères allant jusqu’à se perdre dans les vents. Isabelle Gayet pose sa plume sur la fragilité des choses, sur l’éphémère. C’est une poésie qui permet de maintenir l’insaisissable. Les mots s’écoulent dans le livre d’art qui les emporte comme un bateau. Elle rêve d’un bouquet de poèmes, de chants furtifs. Parfois sa poésie se veut énigmatique et se met en absence. Par le jeu de l’écriture, prétendre voir en la femme un cours d’eau vive, un espoir, un creuset de vie, une espérance. Isabelle Gayet s’envole sur l’aile du jour, pour aller cueillir de divines merveilles. Elle s’attache à la liberté d’aimer et de penser. Quant à Joëlle Vincent elle voit disparaitre sa forêt pour assouvir la soif des finances, ses arbres sont massacrés, découpés, exportés. Notre poétesse rêve secrètement au retour de la vie du temps des amours. Elle joue aussi avec les couleurs des saisons et de l’automne qui s’enflamme dans les chaleurs estivales. Pour elle le blues lui donne une possibilité de réveiller la parole endormie ou retenue. Parfois sa poésie se fait mystique, alchimique, elle conduit aux frontières du possible et de l’irréel. Tout se situe sous le jeu du verbe, du mystère de la poésie et de la fuite du temps. Elle chante le lien du poète à une sorte de confrérie du beau, du vrai, de l’émotion. Elle y cherche des frères d’âmes. Joëlle Vincent entre en amour par le poème désir et séduction pourtant bien fragile. Elle laisse aussi la nostalgie la plonger au cœur du silence, sous la forme d’une connivence. Chez Noël Métallier l’arbre se fait voyageur et pourtant la cognée du bucheron aura raison de lui. Pourtant l’espérance est là, un jeune arbre pousse sur le macadam : - Dans ce tunnel à quatre voies / Vit un arbre que nul ne voit.../... – Lui aussi ressent ce besoin de déposer entre ses vers des couleurs d’automne, des parfums de fruits de saison. Ici se pose l’éternelle question de la fuite du temps, qui est d’ailleurs le credo de cet ouvrage commun. Il a besoin de solitude et de marcher seul en hiver dans les ruelles du Mont-Saint-Michel. Il arrive aussi à Noël Métallier, c’est le propre du rêveur en liberté, de se voir dans les yeux de l’amour qu’il savoure comme un nectar divin. Autre rêve de notre ami, pouvoir par la poésie éradiquer le malheur en veillant silencieusement sur le bonheur.
Michel Bénard.
Recension : Monia Boulila – Ressac de lumière –
Préface : Christine Détrez.
Illustration de couverture Jean-Jacques Oppringils.
Editions les Poètes français – 2021- format 14 ½ x 21 – nombre de pages 59 –Difficile de prétendre apporter plus à la signifiante préface de Christine Détrez, qui frôle l’essentiel, effleure le sensible, révèle le point d’orgue de la fréquence humaine et poétique de Monia Boulila pour son nouvel ouvrage « Ressac de lumière », dont je me souviens le prix Charles Carrère que nous lui avions attribué au Cénacle européen des Arts et des Lettres. Alors je ne reprendrai pas ce qui a déjà été dit à propos de l’expression de Monia Boulila, je l’évoquerai différemment. Tout est contenu dans le dérisoire, l’éphémère, la fragilité de la vie.Que peuvent les mots, que peuvent-ils en dire sinon les habiller d’un éclat de lumière, d’un petit supplément d’âme. Alors, modifions le destin, transformons le chemin en délicate chanson « Je renaitrait Amour ». Déposer un peu de brillance sur l’obscurantisme, tel est le cri de la « femelle » qui se sait femme, passeuse de vie et créatrice d’amour. Femme mère porteuse de l’univers. « Des femmes souffrent, pleurent, se taisent, meurent, beaucoup sèment la vie de tout bord... ». Le cri de Monia Boulila est un hymne à l’amour dont l’aiguillon trucide le mâle conquérant. Il est tant de non-dits qui ne demandent que lumière et rupture du silence. La réflexion s’impose : et si un bon mensonge pouvait détrôner une mauvaise vérité pour sauver une parcelle de vie ! La parole du poète est un chant de liberté. Lorsque les cœurs sont secs, notre poétesse tend la main pour retenir les nuages et lorsque la culture est berbère, on connait la valeur de la pluie. C’est un privilège pour Monia Boulila de savoir que face à un amour perdu il restera toujours la poésie. La vie est un combat d’entre-deux se situant entre le mensonge et la quête d’amour qu’une vie entière parfois ne suffit pas à trouver. Par la voix et la voie de la poésie, Monia Boulila nous découvre sa nudité intérieure. Femme libre jusqu’à se faire poème « Et célébrer l’amour et l’amitié. »
Michel Bénard.
Recension : - René Le Bars – Reflets d’éternité – Préface Jean-Charles Dorge – Illustration de couverture Michelle Gouraud – Illustrations Brigitte Simon – format 15x21 – nombre de pages 63 –
La poésie est une ouverture sur le monde qui contient un champ infini et un espace intemporel. René Le Bars nous avertit en introduction par une citation de Victor Hugo : « .../...le poète est celui qui ressent et prend en charge les sentiments qui font de l’homme un être exceptionnel. »
Son préfacier Jean-Charles Dorge, président de la Société ne manque pas de nous rappeler la densité de la poésie de René Le Bars, qu’il perçoit au travers de son intemporalité et son infini, sans oublier cette alternance entre la ténèbre et la lumière. Voici bien une poésie qui porte la résonance de l’humanisme et de l’universalité. Oui René Le Bars est une belle et grande âme.
Les trois premiers vers de ces – Reflets d’éternité – « Les rêves prennent naissance / Quand l’horizon se noie / Dans le sang des crépuscules. » nous révèlent la présence d’un éminent et authentique poète, pourtant cette plume en or est de la plus grande discrétion et modestie.
Par nature fidèle à la poésie classique, René Le Bars ne s’emprisonne par aveuglement dans un système, il sait aussi se libérer de la forme trop intègre, des contraintes limitant l’expression, cela pour notre plus grand plaisir. Il donne au fond une liberté sur la forme. Je serai franc, j’aborde la poésie de notre ami avec une grande prudence et modestie, j’avance sur la pointe des pieds, car ici nous avons à faire à un esthète, un initié. « La beauté frissonnante du matin / Etend ses draps blancs. » ou encore « Gravir le long chemin qui mène à la beauté,.../... » René Le Bars ne tombe pas dans les pièges ni les automatismes, ni les habitudes, il fait preuve d’un bel éclectisme et son travail n’a rien de répétitif. Il nous invite à partir en voyage au-dessus de la canopée, dans les nuages au cœur de la beauté du monde dans l’attente peut-être d’un nouveau jour. La poésie chez René Le Bars est un havre d’espérance qui conduit vers la beauté avec des parfums d’éblouissements d’enfance : « Gravir le long chemin qui mène à la beauté.../... » Il nous plonge au cœur d’un univers détenteur d’une grande sensibilité brocardée de subtilités verbales où s’entremêlent, symboles, images et métaphores : « Une mouette rêve en rond au-dessus du cimetière de bateaux.../... » René Le Bars a conscience que la poésie peut aussi se faire visible en passant par le chemin de l’art graphique. C’est ainsi que de beaux dessins ou peintures s’égrènent au fil des poèmes. Je mentionnerai particulièrement les œuvres graphiques de Brigitte Simon.
Lorsque les nuits se font longues, sournoises, cauchemardesques et angoissantes, le poète rassemble ses mots fugueurs, errants et silencieux pour les mettre en musique harmonieuse afin de les retrouver à l’aube : « J’attendrai avec joie la naissance du jour. »
Les poèmes de René Le Bars équivalent à des instants de haute couture, d’échantillonnages de raffinement, de sublimes formules où s’entrelacent rythme et musicalité. Il y a toujours une période d’exaltation à découvrir dans un seul coucher de soleil, dans la beauté de la planète, pourtant bien mise à mal par l’avidité cupide des hommes, ses piètres locataires.
Le poète lance ses rêves comme une prière en pleurs dans les flammes de Notre Dame, participant ainsi à la miraculeuse renaissance s’élevant tout droit vers le ciel comme le grand chêne choisi pour rejoindre la forêt de la charpente pour une nouvelle éternité.
René Le Bars mesure la vie à l’aune des chers menhirs de sa terre de cœur, à la fois puissants et si fragiles dans l’espace cosmique ou mystique devenant : « Phare secret dont la lumière caresse l’esprit.../... » Il nous invite aussi à la prière et à la réflexion avec « Le Christ jaune » de Paul Gauguin jusqu’à trouver la forme d’un possible renouveau.
Michel Bénard.
Tino MORAZIN – Portraits de Femmes... Visages de la Poésie – Prix Victor Hugo 2020- Préface Jean-Charles Dorge – Quatrième de couverture Véronique Flabat-Piot - Illustration de la couverture : peinture sur soie de Chantal Morazin – Editions les Poètes français – 2ème trimestre 2022 – format 15x21 – nombre de pages 31 -
Nul doute, Victor Hugo aurait apprécié à sa juste valeur la poésie de Tino Morazin, lauréat du prix éponyme pour son recueil : « Portraits de Femmes... Visages de la Poésie » Car c’est un fait avéré Victor Hugo ne restait pas indifférent aux charmes multiples et variés de la gent féminine et n’en faisait aucune restriction. Je doute fort aujourd’hui qu’au regard du puritanisme ambiant et hypocrite, qu’avec les féministes intégristes, il eut pu exprimer librement ses attirances conquérantes. Ceci étant dit, la poésie de l’incontournable Tino Morazin nous transporte par la forme et le fond dans un monde de parfums et de rêves évanescents. Dans sa préface le président Jean-Charles Dorge ne dit-il pas que pour le poète Tino Morazin : «.../... le portrait le plus précieux demeure celui de la femme idéale qu’il peut aimer jusqu’au dernier souffle.../... » L’image est idyllique, le poète déploie toutes les règles de la courtoisie, il glorifie la femme avec panache, il en énumère ses qualités, sa beauté, son pouvoir de séduction, son courage, son amour, son humour, le tout baignant dans des sillages de parfums capiteux. Sans doute notre poète idéalise-t-il un peu, il s’éblouit et n’en perçoit pas toujours très bien la réalité. La femme est ici la muse inspiratrice, celle qui vole par l’imaginaire au secours du pauvre poète en absence d’inspiration. Les textes sont d’une grande beauté et se présentent sous les formes les plus variées des règles poétiques. C’est presque un exploit de maitriser autant de nuances poétiques de la plus noble manière. Tino Morazin est une sorte de virtuose du genre. Un concertiste de la poésie qui sait s’arrêter juste où il faut lorsque la forme risque de l’emprisonner. Par sa poésie il entonne un hymne à l’amour, il joue avec le feu de la passion, se fait à la fois trouvère et troubadour, flatteur et séducteur, créateur et esthète. Par une musicalité dominante, il se fait portraitiste et voit en la femme son nombre d’or, son archétype, peu à peu une sorte de jeu complice s’est instauré. Il arrive que le cœur pleure, il cherche alors consolation comme un enfant. Il est pris en otage par l’envoutement et le charme de la femme : « Je suis vaincu par votre charme / Votre sourire me désarme. » Pour être poète n’oublions pas que Tino Morazin est déjà un homme et que sans la femme, il perdrait bien de sa superbe et de son aura. Alors puisse-t-il encore longtemps laisser flotter avec passion cette belle oriflamme qu’est l’Amour.
Michel Bénard.
Recension : - SUN Fang – Une promesse de vie – Préface Jean-Charles Dorge – Conception SUN Xintong – Editions les Poètes français – Bilingue chinois, français - format 15x21 – nombre de pages 59 – 4 -ème trimestre 2019
Immédiatement il se dégage de ce recueil – Une promesse de vie – de SUN Fang, le souffle d’une poésie légère glissant comme un nuage de printemps dans un ciel aux nuances aquarelles. Le temps, ou plus précisément sa fuite est omniprésente. Cet ouvrage est bien un concentré d’espérance battant au rythme du cœur de la poétesse à la sensibilité exacerbée. Nous connaissons bien SUN Fang qui fut lauréate de nos concours de poésie avec le prix François-Victor Hugo. Les scènes de vie sont fugitives et s’effacent dans le miroir, un souffle passe, le temps tiendra-t-il ses promesses ? « Carpe Diem ! » Temps jadis, temps présent, temps futur que nous avons peine à imaginer. Selon nos actions nous tissons notre propre destinée, bercés que nous sommes par la réalité ou l’illusion et nous nous interrogeons sur l’amour à recevoir, à prendre ou à donner ? « Pour parler de l’amour utilisons un langage subtil.../---» SUN Fang, nous transporte dans un univers de brumes légères, un monde d’entre deux, de paysages flottants. Notre poétesse fait une approche du monde, de la société humaine, tout en nuances, telle une onde fluide sur un ciel d’orage, tout se trouve en opposition « La résistance le jour cache la blessure la nuit.../... » Il s’agit bien là d’une poésie qui tend vers une modernité dans le plus pur respect de la tradition et du verbe ancestral. Le temps est sublimé par le miroir, l’image se dédouble, mirage ou réalité, la vie est composée de divers chemins aux milles détours ou obstacles mêlés d’illusions. Sun Fang porte en elle toute la sensibilité et subtilité propre à la femme, qui, en plus est poète et joue avec raffinement de cette intuition naturelle « Il y a une sensation subtile les femmes la comprennent le mieux sans langage.../... » Sa poésie contient toute la vaporeuse légèreté d’un nuage de thé s’éveillant à l’amour aussi fragile. Tout ici est retenu en suspension dans un souffle contenu dans l’encre d’un pinceau de soie. Le cœur se met en équilibre avec l’existence « La voix frôle la peau traverse le corps chantée de cœur à cœur.../... » SUN Fang poétesse jusqu’à la pointe des cheveux a conservé un petit carré de son jardin d’enfance – « .../... toi mon enfant, tu es dans mon cœur. » elle joue à la marelle avec les feuilles, les saisons, une libellule posée sur une fleur de lotus, comme une petite fille éblouie elle effeuille les bouquets de l’amour, ici et maintenant « Hic et Nunc » Puisse SUN Fang s’éblouir et nous éblouir encore longtemps.
Michel Bénard.
Recension : Jin Siyan – Sois bergère de l’égaré – Préface Michel Bénard – illustrations – Benru et Ye Xin – photographie Laure Chen – Editions les Poètes français – 3 -ème trimestre 2023 – format 15x21 – 199 pages -
Il s’avère souvent nécessaire de faire appel à un bon berger pour déjouer l’égarement. Ce berger n’est autre que notre voix intérieure, celle de la révélation, de l’intuition, de la prescience, pour mieux suivre l’oiseau qui est devenu le guide philosophique et spirituel. Le poète porte l’espérance lorsque le monde vacille comme nous le constatons actuellement. Notre poétesse Jin Siyan en a parfaitement conscience lorsqu’elle s’adresse à l’imperceptible oiseau, qui pourtant atteint l’omniprésence. « Oiseau tu demeures énigmatique comme l’aura. » Le rêve serait de vivre dans un univers transparent où tout serait permanent et éternel, de pouvoir dialoguer avec l’oiseau au-delà du mur de la temporalité. Le bon sens voudrait que le poète lâche prise, se laisse emporter par les vents favorables ouvrant le cœur de l’homme et puisse croire en son avènement. Notre poétesse ici effleure le mystère des mystères en nous entrouvrant les portes de l’ésotérisme, la voie sacrée hors du temps, là où il n’y a ni passé, ni futur, mais où seul existe le présent « Ici et maintenant. » Ici s’instaure un profond dialogue avec l’esprit de la nature où seuls sont présents la poétesse et l’oiseau symbolisant le lien avec l’âme. Jin Siyan souligne par les nuances de l’acte poétique, la vulnérabilité de l’être, sa solitude, sa chute dans les abysses de l’existence, jusqu’à devenir cendre, poussière et miracle de la vie porteuse d’espérance. Comme le Phénix, toujours renaitre. Cependant, à bien y réfléchir si nous nous référons à Aristote, la solitude choisie est peut-être un bienfait : « Plus je suis seul plus je trouve réconfort dans le mythe. » Dans la roue des symboles, nous laisserons l’éléphant et l’oiseau ériger sur le monde l’emblème de la Paix et de l’Amour.
Michel Bénard.
Recension : - Daniel Convenant & Michel Bénard – Sur les pas du silence - postface Catherine Garrigue - Editions les Poètes français 2022 - format 21x21 – nombre de pages 78 -
Être peintre, poète, artiste, c’est déjà revendiquer son besoin de vérité, d’amour, d’humanisme, c’est respecter la vie et oser encore croire en l’homme, c’est tendre tout entier vers son devenir, loin des aveuglements de l’extrême, à l’écart des régressions fanatiques et sectaires et en marge des ignorances obscurantistes. La poèsie ici, avait trouver son écho, son effet miroir. L’histoire de l’art est très longue de ces rencontres et communions entre peintres et poètes. Les exemples sont pléthores. Daniel Convenant porte en lui une forte vie intérieure qui oscille entre le profane et le mystique. Progressivement il se met en marge du temps. « C’est dans ma création que je me questionne, me surprends et essaie de me dépasser. » Nous dit-il, mais je soulignerai « me dépasser » ! Son œuvre actuelle se présente sous la forme d’une calligraphie informelle s’ouvrant sur les champs de l’imaginaire. Il se met dans l’observance de la nature, il cherche une fusion entre le minéral. Le noir imprégné à la matière bitumineuse libère sa lumière où parfois je retrouve en écho le discours théorique de Pierre Soulage sur le « miracle » de la lumière du noir sans doute un peu idéalisé comme prétexte et qui lui aussi utilisa des bitumineux. Ici d’ailleurs réside toute la poésie de l’œuvre de Daniel Convenant, il s’agit d’une sorte de lumière révélée par le noir qui transparait. La symbolique de l’arbre est omniprésente dans l’œuvre de notre artiste, le temps investit l’espace, matérialisé par les anneaux de croissance. Par ce chant des signes s’éveillent d’insolites enluminures où la beauté devient un germe d’amour caressant la mémoire du temps.
Michel Bénard
Recension : - Christian Malaplate – Dans le calice de la nuit le pollen de la vie – Editions les Poètes français – format 15x21 – nombre de pages 63 – 1 er trimestre 2023 –
Christian Malaplate est une voix en résonnance et dominante dans les cénacles poétiques et cercles radiophoniques. Fort d’une œuvre importante, il nous revient avec en main son petit dernier : - Dans le calice de la nuit le pollen de la vie - Christian Malaplate est un poète qui donne sens, qui équilibre, en nous replaçant sur les solides fondations de l’origine de l’acte poétique. Temps lointains où les bardes transmettaient la connaissance par la poésie. A cette époque les temples étaient encore au milieu du village, ce qui n’est plus du tout le cas aujourd’hui. En ces temps le Verbe s’imposait en référence. Christian Malaplate est en fait une sorte de pèlerin en errance permanente traversant les terres de la poésie et des racines de l’humanité avec son bâton de route, son makila. La matière active et vivante de sa poésie émane essentiellement de ses carnets de voyage, un peu à la Delacroix. Nouveau fruit d’une déjà longue lignée, ce recueil pollinisé par les abeilles de la vie est une invitation à la réflexion, au silence contemplatif – Il faut entrer en prière pour que la lumière change de robe.../... - composée sous le sceau de la maturité et de l’expérience. Chez Christian Malaplate la poésie peut vite devenir une pérégrination initiatique restituant une signification à l’existence, au pourquoi sommes-nous là ? Mettre sur les mots les couleurs de l’espérance, l’hymne de la fraternité et écarter les relents fétides de la haine et du mensonge – Le désir des pierres est de faire pousser l’herbe de la paix. – Dans le message poétique de notre ami, nous croisons de remarquables métaphores porteuses de sages luminosités. A sa manière Christian Malaplate revisite la signification de la poésie en tenant à lui transmettre une forte vibration. La poésie peut aussi devenir une prière universelle, un souffle de repentir, une confession. Le Verbe ici change de dimension, il psalmodie plus qu’il ne s’impose. L’amour dans la poésie de Christian Malaplate détient une place favorable et délicate. Il l’aborde sur la pointe des pieds, tout en douce nuance, elle se fait légère comme un goût de miel ou de sel sur les lèvres. Le langage effleure le singulier, le déroutant parfois. Christian Malaplate poétise le narratif, il lui donne corps. Il s’interroge sur les séquences de la vie, lorsque la société, le monde des hommes, le plus cruel, ne porte pas les couleurs espérées. Lorsque les chemins se font incertains, les mots protecteurs veillent sur nous et comme au temps des chevaliers, ils font le guet : - Être un guetteur de signes obscurs du monde.../... - Il arrive aussi parfois que le seul piaillement d’une hirondelle nous conforte dans nos promesses et espérances. Notre poète pérégrine entre les lignes de ses poèmes comme dans un grand chemin initiatique. Cependant à se vouloir pèlerin, le mystère de la forêt, l’énigme des hautes terres ne suffisent pas toujours au poète, mais lorsqu’il fait une pause pour retrouver le corps d’une femme, alors comme par miracle tout va mieux ? Un retour aux sources s’impose, mais comme les choses ont changé qu’est devenu le premier amour ? Celle encore au seuil de l’enfance, seins tendus sous mes caresses disait : - .../... bientôt je serai à toi. - Ce recueil de narration interrogative a pour vocation de faire le point sur le chemin parcouru et celui à venir. L’écriture ici joue un rôle protecteur qui préserve des assauts du monde, surtout de la société des hommes. Il laisse à l’écriture la part du sacré. Ce recueil contient la voix intérieure, la quête est infinie, éternelle, son chemin conduit vers l’universel. En conclusion ce sera l’amour qui aura raison – L’amour a un sens profond et il dirige tout. -
Michel Bénard
Recension : - Yannick Resch – Ecrire la couleur du jour – Illustration de Véronique-Louise Perchaud - Editions les Poètes français – format 15x21 – nombre de pages 56 – 1er trimestre 2023.
Yannick Resch nous offre sa palette poétique, compose son nuancier, ainsi la couleur d’espérance sera prépondérante en ce nouvel ouvrage - Ecrire la couleur du jour. - Comme son illustratrice, Véronique-Louise Perchaud, notre poétesse joue avec les tons rompus, à la fois sourds et lumineux, un univers diaphane que recouvre un voile mystérieux en écho à la poésie. Les images sont brèves, mais denses, elles cinglent là juste où il faut. Pareille à Colette, celle dont elle porte haut, loin l’esprit et l’œuvre majeure, Yannick Resch femme libre, le révèle parfaitement dans ses jeux d’écriture, où le poème ne subit pas les contraintes de la ponctuation. Le principe est symbolique certes, mais très significatif. Yannick Resch évoque souvent avec la plus grande pudeur, le côté éphémère et fragile des choses, tout est fugitif, tout se dérobe. Yannick Resch est une plume qui va à l’essentiel, à l’évidence. Les sensations sont fugaces, les univers parallèles se mêlent aux silences, aux cris, aux désirs de vie et aux promesses trahies. C’est une poésie qui a besoin d’un souffle, de lumière, de transparence jouant sur les traces de la mémoire floutée pareille à une photographie ancienne. Puis la vie resurgit, un besoin de chaleur humaine s’impose, l’envie de se resserrer, de remplir le verre et boire l’instant qui passe dans un silence éphémère. Les scènes de vie sont parfois difficiles à accepter lorsque la misère est là sous forme humaine repliée dans l’ombre. À cet instant la misère devient visible et bien vite s’efface, tout passe. Au fil de son écriture, Yannick Resch soulève souvent des questions existentielles, afin peut-être de revenir à l’essentiel. Il est parfois difficile de traverser les angoisses, le tourment de la nuit, son poids nous entrave et dès que commence à poindre les premières lueurs du jour alors : - .../... d’un seul coup sans penser à rien on sait – L’osmose entre le poète et la nature est fulgurante et tout se fait acquiescement de la terre, des pierres, du végétal, mais : - Saurons-nous les partager ? – Cet ouvrage est une narration en divers tableaux sociaux en quête d’un peu de chaleur humaine. Nous refermerons ce recueil sur un mode d’emploi pour écrire un poème en clin d’œil à Jacques Prévert. Yannick Resch a le sens du partage, de la transmission : - .../... attendre pour écrire le son qui fait signe attendre que les mots sous la main dessinent une ville un paysage.../...et s’élancer. –
Michel Bénard.
Recension : - Elena Fernández-Miranda – 15 poèmes tristes, 15 chansons joyeuses -
bilingue français et espagnol – postface Philippe Courtel – Editions les Poètes français – 1 er
trimestre 2023 – format 15x21 – nombre de pages 79 –Le dernier recueil – 15 poèmes tristes 15 chansons joyeuses - de la poétesse et essayiste
Elena Fernández-Miranda s’ouvre sur un décor de quais de gare réveillant toujours un angle
de la mémoire, les images reviennent entre deux brumes, en tourbillons enivrants, la lumière
s’imprègne de séquences parfois joyeuses, la nuit inspire le plus souvent tristesse et nostalgie.
La main de l’être cher et proche frémis dans le vide de la nuit, elle lance comme un appel. Ici
nous rencontrons une poésie poignante, érigée sur un vécu en déchirure « Que redoute mon
âme déjà éteinte ? » L’œuvre est marquée par les traces d’une intense dualité entre ombre et
lumière, joie et peine. Voici une écriture émouvante ne laissant nulle place à l’indifférence.
Deux langues cohabitent et se répondent en effet miroir. Voix hispanique chaude et
déchirante, voix des terres du Nord romantique et tragique enveloppée d’un silence de brume,
un souffle intemporel. Notre poétesse tente par l’acte poétique se reconstruire, se réinventer,
dans un monde où elle transcende la réalité. Cette écriture est un appel, une espérance tressant
un lien entre deux mondes, le temporel fragile et éphémère, le spirituel magnifiquement
révélateur et éternel. Une porte parfois s’ouvre sur la solitude. Au-delà de l’ombre solitaire,
l’espoir, la joie, l’allégresse reprennent de temps à autres leurs droits, alors c’est l’heure où
l’on court dans le vent, dans les rires d’un enfant. Le temps revient où notre poétesse se tisse
des rêves d’argent, des songes enchanteurs, comme clés d’un autre bonheur. Ce recueil touche
à son terme en s’ouvrant sur un éventail d’espoir, de vie, de jeunesse, de beauté et
d’espérance, entre prières et chimères déposées sur une mèche blonde, éclaboussant tout de
lumière : « Ay què dias de flores y què noches de plata / Tejer suenos de espuma / Como
rosas en rama » « Ah que de jours fleuris / Que de nuits d’argent / Tisser des rêves d’écume /
Comme roses sur la branche. »Michel Bénard.
Recension : - Serge Carbonnel – Un dur confinement est toujours dans ma tête – suivi de – Il existe un chemin au bout de la forêt – Postface de Pedro Vianna – Editions Société des Poètes français – 3 -ème trimestre 2023 – format 15x21 – nombre de pages 55 –
Serge Carbonnel, fidèle acteur au sein de la Société des Poètes français, venant de publier « Un dur confinement est toujours en ma tête » est un rêveur dont les chemins d’errance furent entravés par quelques virus coronariens sournois, dix-neuvièmes du nom, ayant durant environ trois années bien pénalisés la société et qui d’ailleurs continuent. Mais l’écriture chez notre auteur en fut la barrière salvatrice. Ce confinement synonyme de séquestration lui donna des ailes de liberté et son œuvre s’en émancipa. Le fruit de cette poésie nous plonge dans le mystère de la réflexion, dans l’incohérence de la vie, où tout est dualité, paradoxe et contre sens. Serge Carbonnel pour qui le bruit du silence est devenu insupportable s’offre un vent de liberté lorsqu’il chevauche a cru, dans la Camargue avec une femme aux seins nus. Entre ces lignes nous ressentons un appel furieux de la nature où il mêle sa plume à la terre, au sel, il arpente le monde. L’écriture de Serge Carbonnel, parfois se présente à nous sous une facture quelque peu énigmatique, sorte de fragmentation qui peut nous conduire au sentiment du non-sens comme : « Les mots dits du poulet n’ouvriront pas ses ailes » Nous y croisons des nuances surréalistes, des images insolites « La nuit pour ne plus jamais être .» Un vers « comme l’œil tranché au rasoir » me fait songer au film de Luis Bunuel et de Salvador Dali « Un chien andalou. » Notre poète joue avec les mots, les décale, les plonge dans l’inconnu. Soudain le monde se réduit, le confinement s’étend, le silence se fait pesant, jusqu’à troubler le sommeil. Certains poèmes nous ouvrent les portes de la sagesse, nous conseillent de ne jamais réveiller une femme, de laisser dormir nos peurs. Le langage est codé, il contient un rythme singulier où plane un mystère. La gravité s’invite entre les lignes, elle soulève la question existentielle, l’interrogation profonde du dernier jour, celui de l’absence. Serge Carbonnel vivrait-il l’écriture comme une pandémie, où il faut se replier vers une sorte de confinement ? La question se pose, pourquoi faut-il que le beau, le bon soient si souvent entachés : « Je suis bouleversé, blessé, meurtri, et comme anéanti. » Demain notre poète : « nettoiera tous les chemins du monde, afin qu’on chante la naissance de l’Homme. » Pour être poètes, rêveurs, nous n’en sommes pas moins rattrapés par l’actualité.
Michel Bénard.
Recension : Claude Plocieniak – A l’horizon de ma jeunesse – Editions les Poètes français – format 15x21 – nombre de pages 46 – 3 -ème trimestre 2023 –
Au terme d’une vie bien remplie entre bonheur et malheur, car ayant subie les stigmates d’un drame récurent, l’exil ! Française d’Algérie, je vous dispenserai de la suite, dont l’actualité est hélas encore brulante, voire explosive. Au travers de son dernier recueil édité « A l’horizon de ma jeunesse » Claude Plocieniak effectue un retour aux sources et concrétise une œuvre déjà imposante, s’échelonnant tout au long de sa vie professionnelle au titre de docteur en médecine et sa passion pour la littérature générale et poétique. Il plane ici comme un air de nostalgie, un rêve d’adolescence, un parfum de serments estompés : « Je n’ose pas t’écrire / Et n’ose te parler » Nous sommes ici confrontés à une écriture porteuse d’une cadence répétitive dont le rythme régulier brode des souvenirs d’amour et des songes évanouis. Les textes sont pertinents flirtant avec l’essentiel. Claude Plocieniak, joue à la fois avec les éléments et la nature entre le poétique et le narratif. De belles images parsèment son recueil « Le sable se fane sur la plage » Le langage est clair et limpide et s’offre à nous en pleine transparence et lucidité. C’est une poésie qui hume bon la mer, l’écume et les embruns. Soulignons une forme classique ou néo-libérée. L’œuvre serait incomplète si elle n’adressait pas un petit clin d’œil aux maîtres de la lumière, Turner, Whistler, Monet, où tout demeure dans l’impression. Parfois les textes nous révèlent des suppliques d’amour : « Rien ne t’y oblige. Où vas-tu te perdre ? Ne pars pas. » Notre poétesse compose sa poésie de parcelles de vie, de fragments de rêves. Pour Claude Plocieniak la poésie est un supplément de vie, une coloration de l’âme où il faut : « Réinventer sans trêve / Un coin d’humanité. » Le poème final « Ma muse m’a quittée » est d’une grande beauté toute chargée de pertinence et de clairvoyance : « D’où vient l’inspiration ? / L’amour en est le sel / Dit-on..../ Et la désespérance, / Quelle part y prend-elle ? » Il résume, ce que représente la poésie selon Claude Plocieniak.
Michel Bénard.
Recension : - Enyan - Les Comètes vagabondes – Editions les Poètes français – format 15x21 – Nombre de pages 60 – 3 -ème trimestre 2023 –
Voici une poésie où souffle un vent de liberté, une poésie porteuse de beaucoup de fraicheur, sorte d’errance indéfini, tourbillonnant au gré du vent et des coups de cœur. Cet ouvrage d’entrée en poésie « Les Comètes vagabondes » d’ Enyan, contient un langage portant déjà sa couleur personnelle, son rythme, sa mesure où la facture est déjà reconnaissable. La signature est sous-jacente. Une délicate sensualité se glisse discrètement en filigrane entre les lignes subtiles et délicates. Il se dégage du coté de ces textes une certaine volonté de modernité, de langage teinté et codé, la suppression de ponctuation imposant au lecteur de resituer le texte à sa guise. Pour se vouloir modernisé, le langage n’en est pas moins porteur de sensibles délicatesses et d’amours discrètes. Cette poésie nous transporte vers des chemins pastoraux, sous la magie de la nature aux flamboiements infinis. Au travers de cette expression nous croisons de petits passages angéliques des plus charmants. C’est une poésie qui se voudrait classique mais qui en fait respire la liberté, qui use de parades personnelles, de jeux de mots, qui souvent n’apportent rien de plus au poème, mais lui donne une sorte de particularité. C’est un jeu entre quatrains, alexandrins et sonnets. Nous nous quitterons sur un rêve lumineux, celui d’un poète encore un peu égaré dans les méandres des chemins incertains du verbe : « Si le sort de mon cœur en vingt ou cent poèmes / Est de s’embraser vif au milieu des damnés / Que son feu soit du bleu de l’encre que je sème. »
Michel Bénard.
Recension : - Jean Sebillotte – Au fil des ans IV – Editions les Poètes français – Préface René Le Bars – illustrations de l’auteur – format 15x21 – Nombre de pages 87 – 3 -ème trimestre 2023 –
Nous l’attendions ce recueil tel un chant de la destinée – Au fil des ans IV – de Jean Sebillotte, mieux nous le pressentions. L’homme est de talent ! Artiste peintre depuis des décennies et poète par passion. Nous connaissons son œuvre, sa démarche et pourtant nous l’abordons toujours avec étonnement. L’auteur nous avertit, les poèmes de ce recueil ont été composés au fil du temps, aux caprices des événements du théâtre de l’existence, avec ses heurs et malheurs, ses plaisirs et douleurs. La poésie est souvent le miroir de la vie, l’autoportrait de son auteur. Jean Sebillotte est un personnage discret, délicat, cependant présent par l’art et la poésie ses deux piliers. Son préfacier, René Le Bars, poète autorisé, le confirme, il voit en Jean Sebillotte un poète de la vérité et de la liberté d’un naturel optimiste qui considère que la vie est belle au-delà des chaos et que la poésie en est le baume. Le poète dénonce les exactions guerrières distillant tant de souffrances pour simplement satisfaire l’orgueil et le syndrome de quelques tyrans et autocrates aveugles de pouvoir : - Dieu que la beauté et l’art sont conquêtes incertaines. – Ce recueil est pareil au balancier de l’horloge du temps il oscille d’une scène existentielle à l’autre, du plus terrifiant au plus sécurisant. Les tableaux quotidiens s’enchainent, se mêlent, au travers d’une sorte d’ivresse désabusée. Notre poète joue avec les métaphores et les associations d’images, n’oublions pas qu’il est un excellent peintre jouant avec la palette de l’alphabet. Il dialogue avec l’homme qu’il voudrait meilleur. Sa poésie est comme une incantation, une prière muette où – Dieu - apparait en filigrane. Au passage, un clin d’œil à Baudelaire, se situant entre le bien et le mal et à Apollinaire ce trublion épris de calligrammes. Dans cet ouvrage le temps passe silencieux et sournois. Véritable prise de conscience marquée par le sceau de l’espérance. Mais dans tous ces imbroglios du chemin de vie, il ne faut pas oublier l’Amour en ses flots tumultueux autant qu’enivrants, Amour sage ou coquin il est là au bout de la plume. La destinée frappe parfois injustement et pourtant le poète reste fidèle pour assister, consoler, aimer ! Sans amertume il prend toujours les bonnes résolutions. Désormais il nous reste à espérer le chant de l’an V.
Michel Bénard.
Recension : - Corinne Delarmor – Nurserie du poème – Editions les Poètes français – format 15x21 – Nombre de pages 96 – 4 -ème trimestre 2023 –
Mon plaisir fût grand et authentique de découvrir le recueil – Nurserie du poème - dont nous devons la naissance à la plume de Corinne Delarmor. Prélude au titre intriguant où tout acte poétique est une naissance, un songe délicat, un flot où se reflète l’âme du poète. Une œuvre délicate nous introduisant dans le mystère du monde animal. Le poète a ce privilège de pouvoir se prendre pour un oiseau voletant de feuille en fleur, de rêve léger en tangibilité. Corinne Delarmor se fait brodeuse d’écume et de parfum, d’ombre et de lumière, elle dépose dans ses vers la fraicheur de ses songes, elle laisse filer les saisons au grès des promesses d’amour et de bonheur. C’est une poésie délicate qui caresse la porte du cœur. C’est une poésie libre, sorte d’errance au cœur d’une nature encore pure, d’animaux, le tout ponctué de petites notes lumineuses. Tout est fraicheur, beauté, lumière et nuances. Une plume qui se veut tout de tendresse et de caresse. Elle sauve ses poèmes tombés à l’eau avec son épuisette poétique, à vous de reconstituer ces textes sauvés de la noyade. Notre poétesse joue la funambule sur la fragilité d’une ligne bleue qui porte tout le reflet de sa poésie. Les images poétiques nous enveloppent, nous transportent sur un alphabet mouvant. Pour Corinne Delarmor la poésie sort victorieuse des mensonges, des non-dits, des blessures et morsures de la vie, la magie est totale, elle va même jusqu’à changer la couleur de l’âme. Simple constat, la vie passe vite et à force d’attendre nous arrivons à son terme sans l’avoir vu passer, alors prenons vite en marche le vol migrateur de la poésie pour en profiter encore un peu. Il arrive que la blessure soit profonde au constat des drames de la guerre, des chaos de l’inutile, de l’apocalypse « tel un hurlement muet. » Et dans ce décor inquiétant, oppressant, oser encore découvrir l’amour corps et âme. Avant de prendre congé, allons main dans la main avec notre poétesse, graver pour l’éternité ses poèmes dans la pierre et que les oiseaux liront à chaque migration.
Michel Bénard.